Compte rendu du séminaire

   

 

Journée-débat de l'ACAD-MAE du 26 juillet 2001

Discours introductif

Discussion entre le DG et la salle

Synthèse des interventions & débats

Ateliers et tables rondes

Compétence

Mobilité

Formation

"L'enjeu des ressources humaines
dans la coopération internationale de demain"

BRUNO DELAYE, directeur général de coopération internationale et de la coopération

Je vous remercie pour votre invitation, car il ne pouvait y avoir un meilleur prolongement aux Journées du réseau qui viennent de se tenir au Palais des congrès, que cette rencontre et cette discussion sur le thème des ressources humaines dans la coopération internationale de demain.

Le vaste "chantier" des ressources humaines, qui est partie intégrante de la réforme de 1998 de notre dispositif de coopération, n’est pas encore totalement achevé, ni sur le plan de la gestion, ni sur le plan du vrai mélange des "cultures" des deux institutions, ni même encore au niveau de la vraie perception par les agents chargés d'avoir une politique à moyen terme dans ce domaine.

Si l’on veut vraiment réaliser la réforme mise en place selon les organigrammes et les objectifs définis, il faut passer à la troisième étape, qui est celle de développer une vraie politique, à moyen terme, de mobilisation de la ressource humaine et d’investissements massifs dans une ressource humaine de qualité pour les années qui viennent.

J’en suis persuadé depuis le début, c’est la raison pour laquelle aussi, en arrivant à la DGCID, j’ai souhaité qu’il y ait une véritable Cellule des ressources humaines, directement placée auprès du directeur général, et qui est actuellement animée par Alain Fohr dont l'une des fonctions est de nous conseiller en permanence, Yves Saint-Geours et moi-même, en vue d'une bonne gestion de la ressource humaine, et aussi faire en sorte que nous puissions avoir, au sein de la DGCID, une réelle possibilité de discussion avec la DGA-DRH, l’entité au sein du ministère des Affaires étrangères chargée de gérer les agents, leur profil de carrière. On peut ainsi avoir, effectivement, une politique visible, lisible, compréhensible, et puis surtout aussi essayer de bien traiter les agents, et de les traiter humainement.

Notre atout, c'est avant toute chose reconnaître qu'il y a une formidable diversité humaine et professionnelle: dans cet ensemble, qui constitue celui de la coopération au service du ministère des Affaires étrangères au sens large, on trouve en effet des gens issus du monde médical ou du monde de l’économie; qui peuvent venir des milieux du développement ou de la culture; qui viennent du secteur de l’enseignement... et bien sûr de la diplomatie. Tous sont à des moments ou des étapes différentes de leur vie professionnelle. Ils se retrouvent ensemble, pendant une certaine durée, pour exercer à peu près le même type de métier dans des pays tous forcément différents, mais au service d’une même politique. C’est un atout exceptionnel, et qui peut se révéler compliqué à gérer, notamment parce que nous sommes en présence de trajectoires très différentes selon les agents: certains étant de passage tandis que les autres sont là pour rester. Nous avons à la fois des collaborateurs à qui nous disons: "On va prendre vos compétences pour un temps limité, on va vous envoyer à l’étranger où vous allez travailler pour nous, et l'on se séparera...". En revanche, il y en a d’autres à qui l'on dit: " Vous faites partie de la maison, et vous allez y demeurer". Néanmoins, le sentiment, qui m'a été rapporté, est qu’il y a deux catégories de gens dans la maison, ceux qui en font vraiment partie, ceux qui sont presque nés dedans, et puis les autres, qui sont un peu, et qui ont parfois le sentiment d’être des pièces rapportées à l’édifice.

Il y a ainsi des aspects pratiques et administratifs, à côté des aspects statutaires dont je ne vais pas parler dans tout le détail aujourd’hui; mais, il y a aussi des aspects psychologiques sur lesquels, il faut à tout prix, et cela fait partie de mon travail, agir en permanence afin que tout le monde se sente à l’aise sur le même "bateau", quelle que soit son origine, quel que soit son "port d’embarquement", quel que soit son mode de recrutement. Ceci est fondamental, et si l'on ne réussissait pas à développer cette "culture commune" à partir d’une diversité reconnue, la réussite de la réforme serait en péril, assez vite.

Nous avons passé la phase 1, comme je vous l’ai dit, qui était la mise en place des "outils". Il s'agit désormais d’essayer d’atteindre un certain nombre d’objectifs en fonction d’ambitions qui ont été définies, et rappelées par les ministres qui se sont succédés pendant les dernières Journées du réseau.

On a sécurisé les moyens budgétaires et les effectifs, ce qui nous a été rappelé par notre ministre, c’est à dire qu’on arrête la logique d’attrition et la chasse au gaspillage systématique érigée en politique. Finalement, c'était les rapports d’inspection sur des postes "jugés inutiles" qui définissaient la ligne politique.

Quant aux crédits, ceux du ministère des Affaires étrangères ont passé leur temps à baisser. Cette baisse a été enrayée depuis 1999, mais la réaugmentation des crédits du ministère des Affaires étrangères ne s’est pas traduite par une réaugmentation de ses moyens d’intervention. Ceux-ci ont continué à baisser. Il y avait là encore une lente logique d’attrition qui faisait que notre ministère vivait au détriment de son réseau culturel et de coopération. Finalement, une fois effectué l'arbitrage avec Bercy sur la sécurisation du grosso modo du budget de fonctionnement du ministère (les constructions d’ambassades, les indemnités et les salaires de ses personnels étrangers, le rattrapage des effets change-prix...), le budget d’intervention était la proie dépecée en contre-partie de ce qui avait été concédé sur le fonctionnement du ministère.

Cette année, on a essayé d’inverser cette "logique", sans totalement réussir certes, mais cela a néanmoins permis de sécuriser globalement les crédits de la DGCID, et même de les augmenter, au prix d’arbitrages extrêmement sévères rendus à l’intérieur du ministère après des discussions que vous pouvez imaginer, et d'arbitrages rendus par les ministres en personne, Hubert Védrine et Charles Josselin, afin de changer l’ordre des choses et faire en sorte que les arbitrages soient faits en faveur des crédits d’intervention de ce ministère. Je considère là que c’est symboliquement quelque chose qui nous fait théoriquement rentrer dans la phase 2 que j’appelle de mes vœux.

Cette seconde étape, comme je vous le disais, c’est l’investissement intelligent dans la ressource humaine. Qu’est ce que cela veut dire ?

La première des choses, si on parle de la coopération en général, est que nous soyons tous d’accord, au niveau de l’Etat et de ceux qui nous dirigent, pour dire qu’il existe une mission de service public, de coopération et d’aide au développement, et qu’il existe une mission de service public de coopération culturelle.

Cela a l’air évident comme, ça mais cela ne l’est pas toujours. Et pour plusieurs raisons: vous entendez très souvent des gens qui disent: « Mais à quoi bon avoir un centre culturel, les écoles Berlitz, ça suffit »; « A quoi bon faire de la diffusion artistique, le marché peut très bien le faire et si le marché ne le fait pas c’est que nos produits sont mauvais »; « A quoi bon s’escrimer à appuyer la diffusion du cinéma français, s’il est mauvais au départ il ne trouvera pas de clients à l’arrivée »; « A quoi bon faire de la coopération, avoir de l’assistance technique, c’est beaucoup plus simple de donner de l’argent aux organismes multilatéraux. Il suffit de faire un chèque à la Banque Mondiale, pas aux organismes des Nations Unies parce qu’ils gaspillent trop, mais la Banque Mondiale, c’est sérieux! Et de toute façon, vous savez, vous êtes en retard de plusieurs batailles puisque maintenant, c’est l’Europe. Et donc, il faut passer par l’Europe et puis arrêter d’être des Gaulois attardés qui ont leurs petits projets d’aide bilatérale, leurs petits programmes d’aide, leur petite AFD, leur petit FSP et leurs petits assistants techniques. C’est dépassé! ».

D’autre part, on entend aussi: "L’aide est-elle vraiment bien nécessaire ? Puisque, désormais, on s’en rend compte, une bonne négociation à l’OMC pour faire lever les verrous qui empêchent le libre commerce est bien meilleure que tous les programmes d’APD qu’on a développés depuis 30 ans".

Ainsi, si vous rajoutez tous ces raisonnements les uns après les autres, vous en venez à douter  non seulement de ce que l’on fait mais aussi de l’existence même, de l’idée, d’une DGCID, d’une assistance technique, d’une AFD, et ainsi de suite.

Pour l’AFD, en particulier, le problème est sérieux surtout à partir du moment où l'on va entrer dans la "logique PPTE", et que l’AFD sera amenée à faire moins de dons et davantage de prêts. A qui prêter, dans le monde d’aujourd’hui, si l'on ne veut pas relancer à nouveau la mécanique folle de la dette ? Il était important, et c’était un des objectifs des Journées du réseau, de réasseoir -j’allais dire idéologiquement, au bon sens du mot- la notion de service public, de mission de service public, voulu, organisé par l’Etat français au service du développement.

Mais il faut également accepter deux choses :

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la première est que nous ne sommes pas les seuls à le faire et que nous le faisons en partenariat avec d’autres, c’est à dire avec le "mouvement citoyen", la "société civile", les collectivités locales, le mouvement associatif. Ils ont, eux aussi, vocation à s’investir dans ces activités et à être nos partenaires, non pas nos adversaires, mais nos partenaires. C’est tout à fait légitime, et c’est un bon mouvement; sans pour autant délégitimer l’action de l’Etat, bien au contraire.

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la seconde est que l’exercice, ou les conditions d’exercice, de cette mission publique ont radicalement changé: il faut en tenir compte et se réformer soi-même, sinon, au bout d’un moment, on camperait sur les principes sans conserver prise sur la réalité. Ce qui a aussi rendu facile ou relativement facile cette réhabilitation de la notion de service public au service de la coopération, c’est le fait que nous ne sommes pas les seuls, en France, à s’en rendre compte; et que s'il est vrai que l’époque du grand libéralisme à tout crin n’est pas passée, elle a un peu de plomb dans l’aile dans la mesure où beaucoup de gens se rendent compte que dans les stratégies de développement en tous cas, l’absence d’Etat nuit gravement. Elle nuit même totalement. Il est impossible de développer un projet si vous n’avez pas quelque part une autorité étatique, ne serait-ce que pour tenir le pays, et empêcher que des bandes armées le ravagent dans tous les sens. Il était impossible d’aller faire du développement intelligent au Sierra Léone ou au Libéria, il y a quelques années. Aujourd’hui, les premières tâches de la communauté internationale, notamment sur le continent africain, sont les opérations de maintien de la paix. La montée en puissance des opérations de maintien de la paix, sur le budget de l’Etat, est l'une des raisons aussi pour lesquelles, au cours des années précédentes, une grande partie de nos crédits avait été rognée. Les Affaires étrangères, une fois de plus, s’étaient fait abuser en acceptant que ces missions soient logées sur leur budget. Cela va être la même chose avec le Fond Européen pour le Développement (FED), d’ailleurs, je vous le signale : grosse bêtise.

On redécouvre donc le rôle, le besoin, la nécessité de l’existence d’un Etat dans les régulations ou les conditions d’existence du développement. Même chose pour organiser les régulations de la mondialisation.

Comme l’a rappelé le Premier ministre: à quoi cela sert-il d’adopter des règlements au niveau international, s’il n’y a pas d’Etat après pour les appliquer localement ? L’Etat doit aussi relégitimer le cœur de l’action que la France avait entreprise depuis un certain nombre d’années, à savoir l’appui à l’Etat de droit et le renforcement des mécanismes régulateurs des Etats. Ceci constitue, j’allais dire, le coeur d’excellence de notre coopération.

On est très compétent aussi, traditionnellement, dans les domaines de la coopération médicale, de la coopération sanitaire, de la coopération agricole et économique, en appui financier; mais à chaque fois, vous voyez que la spécificité de la coopération française, ainsi que sa valeur ajoutée, c’est d’être capable de rapporter nos actions, nos transferts en matière de savoir, à une bonne organisation, à une juste organisation des systèmes de régulation publique, d’organisation de la dépense, de bonne marche des affaires publique et de l’Etat.

Tout cela nous relégitime donc, mais en même temps, comme je le disais, on a réellement besoin de s’adapter en ce qui concerne un certain nombre de champs nouveaux. Et quels sont-ils?

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Le premier, c’est l’organisation de notre relation avec les systèmes multilatéraux. Il faut faire nôtre cette culture; et j’irai même plus loin: il faut intégrer, au fil des parcours de carrière, des passages dans un sens et dans l'autre, au sein des agences multilatérales et au sein du dispositif de la coopération bilatérale française. Par exemple, nous aurions besoin d’intégrer massivement dans nos structures, soit à Paris, soit dans les Postes, des agents qui ont une expérience multilatérale. Il faut également encourager nos agents à aller dans les structures multilatérales, et à y faire carrière. Ce n’est pas simple; parce que ce ne sont pas les mêmes systèmes de carrière et que, en général, quand on est dans le multilatéral, on n'a pas trop envie de revenir dans le bilatéral. Mais à titre exemple, l’expérience de quelqu’un comme Jean-Michel Sévérino, qui après avoir été vice-président de la Banque Mondiale, à son niveau très élevé, revient à la tête de l’AFD, c’est une excellente chose pour l’AFD.

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L’autre dimension, c'est les nouveaux métiers, les compétences nouvelles, qu’il nous faut mettre en place dans les structures de nos services de coopération et d’action culturelle. Je prends l’exemple des attachés de coopération universitaire que nous sommes en train de créer depuis 2-3 ans; l’ouverture à partir de cette année de postes de conseillers régionaux multilatéraux: c’est aussi un métier nouveau. Nous allons en affecter dans 4 régions du monde, auprès des organismes régionaux. Le fait aussi que nous allons devoir habituer beaucoup de nos assistants techniques à travailler en base régionale. Peut-être que Serge Tomasi, dans le secteur de la santé, vous en parlera plus précisément, mais l’idée, c’est d’avoir des plates-formes régionales d’assistance technique, à Dakar ou à Abidjan, qui rayonnent dans toute une région. On va commencer petit, à titre expérimental.

J’en viens maintenant à un certain nombre d'autres conditions qu’il nous faut remplir, et si vous voulez, on pourra parler plus en détail de l’assistance technique qui est en soit un chapitre extraordinairement important.

Il nous faut remplir, et bien remplir, un certain nombre de conditions afin de réussir cette mission de réinvestissement massif dans la ressource humaine en qualité, une fois qu’on en a stabilisé la base et que l’on est plus dans la logique d’attrition.

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D’abord, il faut qu’on s’oblige tous, les uns les autres, dans nos ambassades, à mieux identifier les besoins. Et donc, à affiner les profils de poste, à faire de gros progrès dans l’écriture des lettres de mission. Le ministère de la Coopération avait une très bonne tradition en la matière. Ce n’était pas le cas du ministère des Affaires étrangères qui, trop souvent, avait tendance à envoyer ses agents sans vraiment préciser leur mission. Notre objectif, c’est qu’il n’y ait pas d’agent qui ne parte à l’étranger sans une lettre de mission réactualisée. Non pas simplement avec la copie où l'on a juste réactualisé la date de la lettre de mission de son prédécesseur, mais avec quelque chose qui a été revu par le Poste, à un niveau élevé, et aussi revu à Paris.

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D’autre part, il faut que pour les recrutements nouveaux, l'on élargisse nos viviers de recrutement. J’ai parlé du multilatéral, mais aussi en interministériel: il faut qu'à l’intérieur des ministères qui sont traditionnellement nos gros pourvoyeurs, ils élargissent davantage le vivier d'offres, et que nous fassions de même pour les appels à compétences dans la société française. Cela veut dire par exemple qu'avec le ministère de l’Education nationale, on a maintenant une commission de recrutement qui fonctionne à peu près bien, ce n'est pas encore tout à fait satisfaisant mais au moins, il y a une procédure formelle qui est en place depuis deux ans. On a mis au point un embryon de procédure du même type avec le ministère de la Culture. On essaie de le faire avec les autres départements ministériels, et aussi de faire en sorte que la DGA-DRH, pour tous les profils de poste mis à recrutement, fasse plus que de les mettre sur l’Internet du ministère. Il faudrait aussi recourir davantage aux petites annonces, y compris dans la presse grand public, afin que nos viviers de candidatures soient élargis.

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Ensuite, il y a le chapitre de la formation. Il est satisfaisant de voir que le monde universitaire n’a pas totalement délaissé les formations de haut niveau dans les domaines du développement. Il y a des formations qui ont été créées dans les universités, comme les DESS de gestion culturelle, les maîtrises de français langue étrangère, qui sont très importants pour nous par rapport aux besoins que nous avons. Sciences-Po Paris a ouvert cette année une formation "major" sur les métiers du développement.

On essaie d’encourager les universités et les instituts d’études politiques à développer plus encore ces formations. Bien sûr, c’est aussi à la mesure des débouchés qui peuvent exister. Mais, il est clair qu’au-delà du simple réseau de la coopération française, il s’agit de métiers à débouchés de plus en plus importants, surtout si l'on tient compte, et on l’a mis en valeur dans les Rencontres de la coopération multilatérale du mois d’avril dernier, du fait qu’il y a une demande croissante à l’international sur les marchés d’expertise internationale. Les chiffres, vous les connaissez, c’est de l’ordre d’une trentaine de milliards de francs par an pour l’expertise intellectuelle. La France occupe une place raisonnable, mais pas suffisante, sur ces appels d'offres internationaux, puisque nous représentons 14% de ce marché. Nous pouvons prétendre à beaucoup plus par rapport au poids intellectuel, scientifique que la France représente. Il s'agit donc de filières à débouchés importants. Si ce n’est pas auprès des structures françaises, au moins sur le marché compétitif international.

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Concernant la formation interne au ministère des Affaires étrangères, on pourrait en parler plus en détail si vous voulez, mais je ne vais pas allonger mon intervention. Cette année, le ministre Hubert Védrine, a voulu mettre un fort accent sur la formation des diplomates au sens large: on a donc ouvert l’Institut d’Etudes Diplomatiques, avec une première promotion d’une trentaine d’agents qui ont tous donné un taux de satisfaction très important sur cette première formation de trois mois. Deux agents de la DGCID y ont participé : ils m’ont dit qu’ils avaient été très satisfaits de cette formation. L’an prochain, cela doit s’élargir à 40 agents. On ne peut pas faire beaucoup plus parce que cela dure trois mois et qu’on enlève les agents de leur structure. Un des aspects positifs, c’est que c’est de la désignation autoritaire : comme ça, au moins, on est sûr que les agents peuvent y aller et qu’ils ne sont pas re-happés par leur service après les trois premières journées passées en stage! Cela dit, cela ne forme que les agents de haut niveau du ministère, et ça n’en forme qu’un petit nombre. Reste entièrement posé, à mon avis, le problème, qui n’est pas bien traité encore en ce qui nous concerne à la DGCID, de la formation permanente des agents qui sont en poste, des agents qui sont en place à Paris et de l’assistance technique. Vous savez que l’assistance technique avait son propre budget de formation au ministère de la Coopération, et qu'il représentait 16 millions. L’année dernière, sur ces 16 millions de francs, 9 avaient été seulement dépensés. La DGA nous a repris cet argent: on s’est battu pour en récupérer une partie car si l'on veut une assistance technique de haut niveau, il faut la former. Devant les arguments de la DGA, tels que les coûts des stages de langue achetés à grands frais sur le marché privé ou l'absence de réelles formations, on s’est engagé à sortir pour le mois d’octobre un plan de formation 2002 pour l’ensemble des agents DGCID au sens large, ceux qui sont en poste, ceux qui sont en Centrale et pour l’assistance technique, au delà des stages de formation des nouveaux partants que nous organisons chaque été.

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Le cinquième point qui est important dans l’investissement de la ressource humaine, c’est d’assurer aux agents la mobilité nécessaire. Comme je vous le disais, la difficulté, c’est qu’il y a des agents qui sont dans la maison et qui vont faire carrière avec nous, et d’autres qui ne sont que de passage. Notre devoir est, premièrement, d’assurer une bonne carrière aux gens qui sont dans la maison. Personnellement, j’essaie de faire en sorte que les gens qui passent à la DGCID y fassent carrière, c’est à dire qu’après un passage à la DGCID, ils soient promus. Ca commence par les directeurs, jusqu’aux agents de base. Je peux vous promettre que je me bats pour tous ceux qui nous quittent et qui ont fait du bon travail, afin qu’ils aient des postes qui les intéressent. Je crois y être arrivé à peu près jusqu’à présent. Deuxièmement, notre devoir, c’est de faire en sorte que les agents qui sont simplement recrutés contractuellement avec nous puissent, quand ils reviennent dans leur ministère d’origine, trouver des perspectives de carrière intéressante. C’est tout le travail que nous menons avec la DRIC du ministère de l’Education nationale. Avec le ministère de la Culture, c’est beaucoup plus difficile parce que c’est un ministère plus petit mais au cas par cas, on y arrive peu à peu. Je considère que c’est aussi l'une des tâches de la Cellule des ressources humaines que nous avons mise en place à la DGCID.

En ce qui concerne l’assistance technique, l’équation est simple. L’assistance technique, c’est à peu près 2000 personnes ou l’équivalent budgétaire de 2000 personnes, soit 1 milliard 500 millions. C’est un outil extraordinaire que le ministère des Affaires étrangères a entre ses mains. C’est de l’or, c’est du diamant, sur lequel il s’était endormi et qu’il était en train de laisser mourir à petit feu, sans se rendre compte de ce que c’était.

La politique d'aujourd’hui consiste à faire prendre conscience que c’est quelque chose d’extraordinaire, que c’est un atout exceptionnel pour la politique de solidarité et d’influence de la France, et qu’il n’y a pas beaucoup d’autre pays dans le monde qui en bénéficient. Il faut donc qu’on se réapproprie intelligemment cet outil en faisant plusieurs choses : la première, c’est de redéployer géographiquement cette assistance technique. D’autre part, dans l’assistance technique, tout en étant au service des Etats, on ne doit pas être leur serviteur, en ce sens qu'il nous revient de négocier intelligemment les points d’implantation de notre assistance technique. L’assistance technique ne doit pas être, si j’ose dire, abonnée. Donc, perdre cette espèce d’habitude de clientélisation, si j’ose encore dire, de l’assistance technique. Je considère que dans 99% des cas, on avait dépassé le stade de la substitution. Quand elle existe encore, elle est parfois justifiée.

Un autre problème est la décentralisation de l’assistance technique. Il faut que les personnels y participent et qu’ils ne tombent pas eux aussi dans le confort de cette clientélisation où on s’habitue au caractère agréable d’un pays, aux habitudes qu’on y a prises, et où l'on en vient à la fin à justifier son poste plus pour des convenances personnelles que pour l’intérêt stratégique d’une mission. Donc, déclientéliser, redéfinir géographiquement, c’est à dire redéployer notre assistance technique, ces 2000 assistants techniques, dont 1600 dans l'ex-champ, et 400 dans le reste du monde. Ca veut dire, par exemple, moins d’assistance technique au Gabon, ou au Sénégal, ou à Djibouti, et plus d’assistance technique en Inde, en Iran, en Chine, au Brésil, en Argentine, en Europe centrale, dans les Balkans, en Russie. On la redéploie sur d’autres pays qui sont d’autres types d’enjeux pour notre politique étrangère.

Pour se réapproprier ce fabuleux outil qu’est l’assistance technique, il faut, d’une part, garder le socle de cette assistance technique dite résidentielle, permanente. Celle-ci va être basculée dans le décret de 1967, c’est à dire que tout le monde sera géré avec le même statut, le même système de paiement qui reste très favorable, qui nous permet d’avoir des gens de haut niveau payés à des tarifs intéressants. D’autre part, il faut développer une assistance technique dite non résidentielle, c’est à dire des gens qui vont pendant un certain temps sur le terrain, mais ne s’y déplacent pas avec leur famille: ils vont et viennent. C’est l’assistance technique ou l’expertise technique non résidentielle. Et pour cela, on doit déboucher, au début de l’année prochaine, sur la mise en place d’une structure. On essaiera de faire en sorte qu’elle soit la plus interministérielle possible afin de nous permettre trois choses :

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la première, de mettre en commun les viviers de tous les ministères, les bacs à ressources ou les réseaux à ressources de tous les ministères et de tous les établissements publics, secteur de la santé, secteur de la justice, secteur des transports, de l’équipement etc., des collectivités locales, extrêmement importantes puisqu’elles représentent un énorme gisement de compétences, très demandées à l’international. Donc, mutualiser les viviers.

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la deuxième, payer et gérer ces gens là. Ca n’est pas les Postes qui vont les payer, ils le seront par cette structure, et l'on réservera, dès la programmation 2002, des crédits pour le faire.

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et troisièmement, avoir la personnalité juridique qui nous permette d’aller aux appels d’offre internationaux, de rentrer dans des consortiums. Vous savez que pour valoriser l’expertise technique française aujourd’hui, on est obligé de se déguiser. On ne peut pas exister en tant que coopération française. Donc, on aura une structure spécifique qui pourra s’associer avec GTZ, avec le British Council, avec un cabinet d’avocat italien, que sais-je encore, pour aller sur les appels d’offre internationaux et valoriser l’expertise française. C’est très compliqué à mettre en œuvre, mais on va essayer, c’est la direction et c’est ce qui devrait permettre, si on réussit, de revivifier complètement l’outil de coopération technique française. C’est un chantier de 2 ans, et beaucoup de travail.

Encore merci, et à l’année prochaine et j’espère avant aussi.

Réponses aux questions de la salle "Séminaire de l'ACAD, été 2001"

BRUNO DELAYE, directeur de la DGCID

Je ne pourrai pas répondre à toutes les questions, il y en avait beaucoup. Mais ce que je voudrais que vous compreniez bien c’est que je n’essaie pas de vous tenir des propos pour aller dans le sens du poil des gens, ce n’est pas du tout l’idée. Ce que je voulais vous expliquer ce matin, c’est qu’il y a une stratégie derrière tout cela, c’est qu’on suit un fil directeur. On ne se contente pas de gérer un outil, on va le faire au mieux.

Le fil directeur est simple : on a fait une réforme en 1998; il faut désormais mettre des moyens en face des outils qu’on a mis en place. Il faut arrêter l’attrition, c’est-à-dire la logique du "On coupe, on élague, on rabote tous les ans". Ensuite, il faut se donner des objectifs en fonction desquels on investit dans la ressource humaine. Ce n'est pas plus compliqué, et ce que je veux aussi préciser, c’est qu'il s'agit d'un travail collectif; ce ne peut pas être le travail d’un petit état major. C’est également un travail de tous les instants pour faire en sorte qu'effectivement, il n’y ait pas de dichotomie entre, d’un côté la "caste" des diplomates qui penserait, qui ferait de la diplomatie et "les autres", qui auraient "les mains dans le cambouis", qui seraient sur le terrain. C’est absurde. Toute la journée, mon travail, c’est d’expliquer à mes collègues que s’ils ne réalisent pas que leur avenir c’est la coopération qui le détient, la coopération culturelle, la coopération au développement, et que s’ils ne s’investissent pas eux mêmes dans ces domaines, un beau jour, ils ne seront plus bons qu’à donner des visas et à faire des plans de table.

Si l'on ne peut pas investir dans l’avenir, si l'on ne peut pas donner des bourses à des futurs dirigeants étrangers, que fait-on ? On gère la parole... On prépare les visites de ministres... On écrit des discours... On s’occupe des visas...? Ce n'est pas satisfaisant. Heureusement, le ministère des Affaires étrangères est en train de réaliser ça. En tout cas, il l’a réalisé au sommet. C’est la conviction intime du Ministre Hubert Védrine: il l’a même dit dans ces dernières Journées du réseau.

Vous avez entendu six membres du gouvernement, à commencer par le Premier Ministre, qui sont venus vous dire cela. Ils ne sont pas entrés dans le détail de la mobilité, des statuts, etc... Mais l'on n'attend pas cela d’eux, je considère que c’est très important qu’ils soient venus dire cela. Cela nous donne les éléments pour rebondir. S’il n’y a pas de consensus, au départ dans la société française, et bien il ne se passe rien, on meurt en silence.

Ensuite, les universités, et les formations universitaires, deux choses:

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    La première, bien sûr, c’est de renforcer les relations et les liens avec les universités; en faisant davantage appel, même si on le fait déjà, à la matière grise qui existe dans nos universités, sous les formes des contrats d’étude, des contrats d’évaluation que nous passons souvent avec les universités, ou certains centres de recherche.

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    Deuxièmement, associer de façon plus générale les universités à notre réflexion et aux filières de débouchés. C’est pour cela que lors des prochaines Rencontres de la coopération multilatérale que l'on va désormais organiser chaque année, il faut qu’on associe davantage le monde universitaire.

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    Troisièmement, et cela fait suite à une réunion de travail tenue hier soir entre Monsieur Védrine et Monsieur Lang sur ce que nous allons prochainement mettre en place, les déclarations d’action internationale des universités françaises. Toutes les universités seront appelées à signer des conventions tripartites. Nous allons proposer aux universités qu’elles rédigent leur plan d’action internationale, qui comportera plusieurs volets: premièrement, la mobilité de leurs enseignants; deuxièmement, la mobilité de leurs étudiants; troisièmement, l’accueil d’étudiants étrangers, et les efforts faits pour mieux les accueillir. Et enfin, quelles filières elles comptent développer sur les métiers de l’international ? Tout cela fait beaucoup de sujets sur lesquels, nous, ministère des Affaires étrangères, nous aurons la possibilité d’influer en mettant un petit peu d’argent incitatif s'il le faut.

On est donc sur ce créneau-là, et on annoncera cela le 29 août au moment de la Conférence des ambassadeurs.

A ce sujet, vous parlez de la différence de culture, des ambassadeurs qui s'en préoccupent peu, qui ne feraient pas attention à ce secteur. Je crois que cela change quand même; il ne faut pas être injuste. Je vois la qualité de la correspondance des Ambassades qui sont sur le champ et ils s’investissent de plus en plus sur les sujets de coopération technique, de coopération culturelle. La qualité augmente et c’est très rare, maintenant, de rencontrer des ambassadeurs qui ignorent ce qu’est un FSP ou un FSD; qui ne savent pas ce que c’est que du titre 6, du titre 4, du titre 3. D’autre part, on essaie d’inclure cela de plus en plus dans leur formation. C’est très intéressant, lorsque Yves Saint-Geours et moi-même, nous sommes allés intervenir à l’Institut d’Etudes Diplomatiques, il y avait des choses dont ils n’avaient jamais entendu parler. Ils ignoraient l’existence d'opérations que nous faisons à la DGCID: "Ah! Vous faites tout cela, mais c’est extraordinaire! ». Le simple fait d’avoir fait un rapport d’activité, de l’avoir distribué dans le ministère, a eu d'énormes conséquences: « Mais vous faites tout ça?... Mais c’est vous qui faites ça, on ne savait pas, on croyait que c’était les autres ministères, c’est incroyable! c’est étonnant... Ah, mais l’AEFE, c’est nous....on ne savait pas ». C’est vrai qu’il faut communiquer et informer, et sur les tables-rondes qui seront organisées pour la Conférence des Ambassadeurs, on en "co-sponsorise", si j’ose dire, 9 sur les 24 tables-rondes qui porteront sur les sujets qui nous intéressent.

En ce qui concerne l’intégration de l’assistance technique sur place, c’est l'un de nos soucis. Les assistants techniques qui sont placés auprès des ministères ne doivent pas être abandonnés, et doivent faire partie intégrante des équipes. On va le faire par le biais des instructions. C’est déjà dans les instructions qui ont été envoyées aux Ambassades pour la mise en œuvre des contrats de désendettement-développement. C’est à dire que les Ambassadeurs doivent animer des comités de pilotage dans lesquels il y a l’AFD, dans lesquels il y a le SCAC, et dans lesquels il y a les assistants techniques sectoriels. Puisque dans les contrats de désendettement-développement, il faudra suivre les fonds qui vont être employés à la lutte contre la pauvreté dans les secteurs sociaux, on aura donc besoin des assistants techniques dans l’éducatif, dans le sanitaire, dans le social, qui suivront l'utilisation de ces fonds dans ces filières là./.

Synthèse des interventions & débats

L'association ACAD-MAE, "Acteurs de la Coopération internationale et de l'Aide au Développement", a organisé le 26 juillet 2001 au Centre de Conférences Internationales, avenue Kléber à Paris, une journée-débat sur le thème : "L'enjeu des ressources humaines dans la coopération internationale de demain".

La présence de nombreux acteurs, français mais aussi étrangers, de la coopération internationale (représentants du ministère des Affaires étrangères et des autres ministères techniques, représentants d'institutions multilatérales -ONU, Union Européenne-, des collectivités locales et territoriales, du secteur privé, des universités et de la société civile) a permis la confrontation de vues et l'échange d'expériences sur la question cruciale que représente, dans un environnement international en mutation, une bonne gestion des ressources humaines. D'une part celle-ci doit s'adapter aux nouveaux enjeux de la coopération internationale. D'autre part, il convient d'identifier les besoins en ressources humaines en réfléchissant sur les métiers et les compétences nécessaires à l'international, d'y répondre dans la cadre de formations initiales appropriées et d'une gestion efficace des viviers de candidatures. Enfin, il s'agit de renforcer et d'adapter ces compétences grâce à des formations continues, mais aussi à une mobilité qui prenne en compte et valorise les acquis professionnels.

 

Les nouveaux enjeux de la coopération et de l'aide au développement, qu'ils soient externes ou internes, influent sur la gestion des ressources humaines au sein du ministère des Affaires étrangères. Tout d'abord, du fait de la mondialisation, le centre de gravité de l'aide au développement et de la coopération internationale a glissé vers les instances multilatérales, au détriment des aides bilatérales, et notamment de l'aide française. D'autre part, de nouveaux acteurs sont apparus, tels que les collectivités locales, les Organisations Non Gouvernementales, les membres de la société civile... Le ministère des Affaires étrangères doit développer ses relations avec les systèmes multilatéraux et avec les nouveaux acteurs de la coopération internationale tout en gardant à l'esprit le fait qu'il existe bien une mission de service public d'aide au développement et de coopération culturelle. L'émergence de nouveaux acteurs et les modifications des conditions d'exercice de cette mission publique ne doivent pas empêcher un nécessaire rôle de l'Etat dans l'impulsion, la régulation et la légitimation de l'aide au développement.

D'autre part, au niveau interne, le ministère des Affaires étrangères doit relever plusieurs défis s'il veut optimiser la gestion de ses ressources humaines. La réussite de cette entreprise passe par le développement d'une culture commune et reconnue de la coopération internationale et la mobilisation collective des personnels travaillant à l'international, sans distinction de statuts ou d'origine. En 1998, la réforme du dispositif de coopération a été lancée. Après la fin de la logique d'attrition et la sécurisation des moyens budgétaires et des effectifs, la réussite de la réforme passe par une bonne gestion de la ressource humaine. Le ministère des Affaires étrangères possède comme indéniable atout une formidable diversité humaine et professionnelle. Pour des raisons pratiques et administratives, mais aussi pour des questions d'ordre statutaires et psychologiques..., cet outil est difficile à gérer mais c'est à partir de cette diversité qu'il faut développer une culture et des objectifs communs. Enfin, le nouveau contexte international appelle une professionnalisation accrue des personnels de la coopération internationale.

Une réponse adaptée aux nouveaux enjeux externes et internes de la coopération internationale comporterait plusieurs aspects complémentaires qu'il conviendrait de mettre en place, en concertation et en partenariat avec les différents acteurs de l'aide au développement.

bulletAmplifier les relations avec les systèmes multilatéraux et les nouveaux acteurs de la coopération internationale. Dans le cadre de la gestion des parcours de carrière, une mobilité à double sens entre les agences multilatérales et les institutions françaises de coopération bilatérale doit être favorisée, de même que la mobilité entre le ministère des Affaires étrangères et les autres acteurs de la coopération internationale. En effet, aujourd'hui, quasiment tous les ministères font de la coopération mais aussi les collectivités territoriales, les collectivités locales, les universités... et ceci, le plus souvent, dans un splendide isolement alors même qu'ils sont source d'un énorme gisement de compétences. Il serait donc souhaitable de rompre cet isolement, d'essayer, dans l'analyse et dans l'action, de confronter les vues.
bulletD'une façon concrète, un certain nombre de participants à la journée de l'ACAD ont cependant souligné combien il est difficile de vivre la mobilité, notamment la mobilité externe (par exemple pour aller travailler pour la Banque Mondiale, au Fond Monétaire international, dans des collectivités locales ou territoriales, dans des entreprises publiques ou des organismes privés...), déplorant l'existence de modalités administratives trop lourdes et extrêmement complexes et la persistance de problèmes statutaires. La mobilité interne souffre également de délais beaucoup trop longs, de lenteur des procédures administratives de détachement et de mise à disposition.
bulletSe pose aussi le problème de la gestion de la mobilité. Plusieurs intervenants, issus du secteur privé ou d'institutions publiques, ont souligné la complexité croissante de l'expatriation : gestion des performances, gestion des attentes du pays hôte et de l'expert, assurer aux agents la mobilité nécessaire en leur assurant une bonne carrière. Dans la gestion de la mobilité, il serait important de prendre davantage en compte l'expérience du candidat. Le secteur de la coopération pourrait s'inspirer de certaines modalités très pratiques de gestion de la mobilité internationale, de gestion des cadres internationaux tel que peuvent le faire certaines grandes entreprises. Alcatel par exemple, il y a 10 ans, a mis en place une politique de mobilité à l'international prenant en compte la diversité de la mobilité selon les profils des candidats et des missions à remplir (missions de courte durée, mobilité européenne, programmes d'échange...), instaurant des rémunérations, des primes à la mobilité et un accompagnement au retour élaboré en fonction du développement de carrière du candidat.

 

bulletIl faut aussi prendre en compte les nouveaux métiers de la coopération internationale, les nouvelles compétences et les mettre en place dans les structures des services de coopération et d'action culturelle (renforcement des compétences techniques, des fonctions managériales, des capacités de négociation et de médiation). Au niveau européen, par exemple, on constate que les ingénieurs, à l'origine prédominants, font place à des profils plus variés (économistes, financiers, sciences politiques...), témoignant d'une évolution des métiers à l'international. Le PNUD, lui, tente de développer des réseaux de capacités et de connaissances pour fournir à temps, aux bureaux de pays, une expertise de qualité. Les fonctions de conseil, les tâches d'appui faisant appel à des compétences plus horizontales que verticales (par exemple, des spécialistes pour gérer les opérations, les procédures et les instruments de programmation) caractérisent ces nouveaux métiers au sein du PNUD.
bulletDes progrès notoires ont été accomplis à la DGCID pour ce qui est de la concertation interministérielle. Il reste à élargir cette concertation à l'ensemble des institutions publiques, parapubliques, privées et à la société civile, ce qui permettrait d'établir une typologie précise de ce que sont devenus aujourd'hui les métiers de la coopération internationale.
bulletL'assistance technique est un atout exceptionnel pour la politique de solidarité et d'influence de la France. C'est un formidable outil, parfois contesté dans sa forme actuelle, qu'il convient aujourd'hui de se réapproprier. La première exigence est de redéployer géographiquement l'assistance technique en fonction des nouveaux enjeux de la politique étrangère de la France. D'autre part, il faut mettre fin à la clientélisation de l'assistance technique : elle doit être au service des Etats mais ne pas perdre pour cela son indépendance. L'assistance technique résidentielle permanente se verra complétée par une assistance technique non résidentielle. Pour cela, le ministère prévoit, pour le début de l'année prochaine, la mise en place d'une structure spécifique, la plus interministérielle possible, visant à mutualiser les viviers et bénéficiant de la personnalité juridique afin de pouvoir répondre aux appels d'offre internationaux et valoriser l'expertise française. Cette structure pourra agir sur le marché de l'expertise internationale au même titre que le font aujourd'hui des organismes comme le GTZ ou le British Council.

 

bulletAfin de répondre aux besoins en ressources humaines, il est indispensable d'établir un vivier de candidatures en collaboration avec les ministères techniques partenaires du MAE mais aussi avec les nouveaux acteurs de la coopération internationale et de l'aide au développement. Il convient d'élargir les viviers de recrutement déjà existants, avec le multilatéral mais aussi en interministériel ou même par petites annonces, y compris dans la presse grand public. La mise en place, avec le ministère de l'Education nationale, d'une commission de recrutement, constitue un précédent dont pourrait s'inspirer les autres ministères. La gestion de ce vivier devrait permettre de se donner plus de possibilités, plus de temps, et plus de garantie pour le choix et la formation des cadres internationaux. La gestion à priori d'un vivier de candidatures induit l'anticipation de la formation des cadres internationaux et donc doit permettre une réponse plus rapide et mieux adaptée aux demandes d'expertise internationale. La sélection et la préparation des cadres internationaux se trouvent aussi améliorées puisqu'on dispose alors du temps nécessaire pour juger les candidats au départ non seulement sur des critères techniques ou strictement professionnels mais aussi sur des critères managériaux, comportementaux ou familiaux dont on se rend compte qu'ils ont aussi une grande importance. Les échecs en expatriation sont évalués à environ 30% des cas, entraînant des retours anticipés et des coûts importants. Ce taux serait réduit, selon certaines études, à 13% avec une préparation et une gestion adaptée.

 

bulletS'agissant de la formation des acteurs de la coopération, il existe aujourd'hui un panel relativement important de formations aux métiers de l'international, il s'agit de métiers à débouchés importants puisqu'on observe une croissance de la demande à l'international sur les marchés d'expertise internationale. La France représente 14% du marché des appels d'offres internationaux et peut prétendre à plus, compte tenu de son poids intellectuel et scientifique. Pourtant, les formations universitaires disponibles souffrent de graves défauts parmi lesquels la mauvaise adaptation aux besoins professionnels, un enseignement abstrait, trop général et des enseignements cloisonnés par zones géographiques ou par sujets, l'insuffisance de l'apprentissage des langues étrangères et de l'enseignement concernant des sujets pourtant incontournables tel que par exemple, les nouveaux enjeux internationaux. Pour remédier à ces défauts, l'université doit s'ouvrir sur l'extérieur, elle ne doit pas seulement produire et diffuser du savoir, elle doit aussi faire appel aux savoir issus d'autres organismes, publics ou privés. L'accent doit être mis sur la mise en place de liens plus forts avec les Universités qui doivent être associées de façon plus étroite aux réflexions et aux filières de débouchés du ministère (par exemple, grâce à la Déclaration d'action internationale des universités françaises, programme annoncé le 29 août 2001 et visant à renforcer les liens entre le MAE et les Universités).
bulletAu niveau interne, a été créé l'Institut d'Etudes Diplomatiques qui forme un petit nombre seulement d'agents de haut niveau. Plusieurs intervenants ont réclamé le décloisonnement de cet organisme de formation.
bulletReste posée la question de la formation continue à l'administration centrale, dans les postes ou pour les assistants techniques. Compte tenu de la compléxité du problème, une commission interministérielle regroupant, à la demande de la DGA, les différents partenaires du MAE devrait se réunir début septembre.
bulletLa situation actuelle n'est pas satisfaisante : en ce qui concerne la formation des nouveaux partants, la plupart des intervenants ont estimé que sa durée était trop courte et son contenu trop général. Ils ont situé la durée idéale de préparation au départ autour de 8-12 mois et suggéré qu'elle s'organise en modules. Mais l'augmentation des moyens donnés à la formation doit s'accompagner de la reconnaissance de cette formation dans les parcours individuels. Aujourd'hui, l'enjeu essentiel semble être la validation de la formation, surtout lorsqu'elle s'inscrit en mobilité. Enfin, il convient de renforcer et d'élargir le système d'accompagnement au retour. Cela passe par une évaluation des compétences acquises qui permette d'apprécier à leur juste valeur les qualités professionnelles des agents et de construire avec eux un profil de carrière adapté. Le ministère de l'Education nationale (notamment la DRIC) pour sa part étudie les modalités de mise en place d'une reconnaissance des compétences acquises "sur le terrain".

LES ATELIERS

L'objectif de la journée-débat organisée par l'ACAD-MAE sur le thème de "L'enjeu des ressources humaines dans la coopération internationale de demain" était de pouvoir élaborer des propositions sur trois volets essentiels de la gestion des ressources humaines : les compétences, la mobilité et la formation, et de les soumettre aux institutions.

 

Le premier atelier s'est réuni autour du thème des compétences utiles à l'international. Tout d'abord, il convient de rappeler ce qu'est une compétence. Celle-ci pourrait être définie par la combinaison opérationnelle de capacités qui permet d'arriver à un résultat directement utile à l'organisation. C'est la capacité à mobiliser et à mettre en oeuvre de façon intégrée et efficace, des ressources de connaissances, de raisonnement, et de savoir-faire. La compétence contribue à produire de la performance.

A partir d'exemple concrets (au niveau européen et dans la région Wallone) trois propositions ont émergé, visant à améliorer l'identification et la mobilisation des compétences.

1) Il convient de s'interroger sur les enjeux et les besoins en terme de compétences selon les différents commanditaires. Pour cela, les participants à l'atelier ont appelé à la mise en place d'un groupe interministériel qui définirait les compétences, les besoins, les profils de poste et les missions. D'autre part, tout départ en poste devrait s'accompagner d'une lettre de mission détaillée et actualisée.

2) Il est important de procéder à un repérage des compétences par la constitution d'un vivier, lequel suppose une plus grande professionnalisation des recrutements, un travail d'évaluation des projets et des acteurs. Il faut mettre en place des outils d'évaluation permettant d'apprécier correctement les compétences et les performances des agents.

3) La mobilisation des compétences passe par la mise en place de mesures de suivi permettant de déceler les besoins en formation et d'y répondre efficacement. Il semble nécessaire par exemple de remplacer les formations abstraites par des formation-actions, d'accompagnement de projets et des stages en responsabilité permettant un transfert d'informations, de savoir et de savoir-faire tout en gardant à l'esprit l'idée qu'il y a évolution des enjeux et des compétences.

Le deuxième atelier a abordé les questions de mobilité, de valorisation de l'expérience et de la carrière. La mobilité, qualifiée par certains de "richesse pas toujours récompensée", apporte des capacités d'adaptation, d'innovation et de créativité, une plus grande autonomie, une plus grande efficacité, un dialogue facilité... La quantité des candidatures ainsi que leur qualité démontrent qu'il y a en France un vivier potentiel important. Cependant, des freins à la mobilité persistent : les compétences linguistiques, la rigidité de l'administration, le problème de la gestion difficile du retour et enfin, le fait que la validation des acquis professionnels soit loin d'être systématique.

A l'issue de leur travail, les participants à l'atelier sur la mobilité ont souhaité faire quatre propositions.

1) mettre en place des cellules de réflexion interministérielles visant à établir un vivier adapté aux nouveaux métiers de la coopération internationale, faire connaître ce vivier et le faire valoir.

2) réduire la durée d'expatriation (à 4 ans).

3) faciliter la validation des acquis professionnels des personnels et tenter de supprimer les barrières statutaires à la mobilité.

4) encourager la mobilité interne mais aussi externe, par exemple, travailler sur des équivalences entre la fonction publique d'Etat et la fonction publique territoriale.

Enfin, le troisième atelier a travaillé sur les questions de formation, d'acquisition et de développement des compétences nécessaires à la coopération internationale. La plupart des acteurs de la coopération internationale, individus comme institutions (collectivités locales, organismes ministériels ou locaux), attachent une grande importance aux questions de formation. Finalement, la DGCID semble être, en France, une des rares administrations qui ne considère pas ce sujet comme prioritaire. Après avoir fait ce constat, les participants à l'atelier formation ont émis plusieurs propositions.

1) développer la formation continue en mettant en place des stages en cours de mission à l'étranger.

2) établir une offre de formation sur les nouveaux métiers de la coopération, offre qui est pour l'instant inexistante ou très peu connue. Les métiers à l'international sont de plus en plus exigeants, il faut, après concertation avec l'ensemble des institutions publiques, parapubliques, privées et avec la société civile, tenter d'établir des réseaux de formation, des référentiels de métiers, des référentiels de compétences et des référentiels de formations.

3) mettre en place un système de validation des formations et des acquis professionnels, pour les personnels en poste à l'étranger ou en France.

4) créer un institut "hors les murs" de formation pour l'international qui ne soit pas réservé aux fonctionnaires et aux diplomates, favorisant ainsi l'émergence d'une culture professionnelle commune dans un esprit de partenariat aussi bien avec l'Etat qu'avec les collectivités locales ou la société civile. Dans cette perspective, l'Institut d'Etudes Diplomatiques doit être décloisonné au profit d'agents contractuels ou détachés d'autres ministères techniques.

En conclusion, cette deuxième journée organisée par l'ACAD-MAE s'est révélée très riche. Elle a permis de comparer les différents systèmes de valorisation des ressources humaines chez nos partenaires du bilatéral et du multilatéral et surtout de faire reconnaître l'Association comme interlocuteur à part entière de la DGA sur les "politiques de formation".

Une première réunion sur ce sujet important a eu lieu le 7 septembre 2001 et son compte rendu sera disponible sur le site dans les meilleurs délais.

bulletLe CIEDEL
bulletLe CNFPT et la démarche métier
bulletLe CLONG et le volontariat
bulletL'International au ministère de l'Agriculture
bulletPolice et coopération interntionale
bulletEurope Aid
bulletAlcatel et la mobilité internationale
bulletENTO et le LE RESEAU EUROPEEN DES
INSTITUTIONS DE FORMATION DU PERSONNEL DES COLLECTIVITES LOCALES
 

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tél. +33 (0)1 53 69 34 58,  fax +33 (0)1 53 69 32 85.
Contact  : ACAD-MAE
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Dernière modification : 03 sept. 2002

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